Wwoof autour du monde

C'est l'histoire d'une journaliste qui va se nettoyer les neurones durant un an en faisant du wwoofing autour du monde.

Pour ceux qui ne connaissent pas, wwoofing: willing workers on organic farms, c'est-à-dire aider des agriculteurs bio et en échange être logé et nourri.

Pourquoi du wwoofing? Parce qu'il combine tout ce que j'aime: la nature, le grand air - ah, les mains dans la terre, finir sa journée crottée - les voyages, les rencontres... Et surtout, je n'avais pas envie de "voyager pour voyager", mais trouver un fil conducteur et apporter ma petite contribution à une autre façon d'envisager notre monde.

Attention! Ce n'est pas un travail journalistique que je fais ici, je ne prétends pas à l'exactitude, mais au partage de ce que je vis. Pour le plaisir, simplement...

lundi 3 avril 2017

Post scriptum

Dix mois ont passé depuis mon retour en France. Cela semble peu et cela semble pourtant une éternité.

Oui, le retour a été horrible; cette sensation d'être un insecte tombé dans une plante carnivore, qui se débat dans le suc de la plante; plus il se débat, plus il s'englue, mais il ne peut s'en empêcher c'est plus fort que lui. Et lentement les sucs de la plante le dévorent... J'ai perdu tout espoir, il n'y avait plus d'avenir.

Je le savais que le retour serait dur; mais entre savoir une chose et la vivre, il y a un gouffre, et j'ai plongé tête la première dans ce gouffre.

Et puis la vie est ainsi, on remonte peu à peu du monde noir. L'automne m'a vu m'apaiser, l'hiver fut dur de nouveau, mais peut-être me fallait-il encore du temps pour digérer, intégrer tout ce que j'avais vécu...

C'est maintenant que je vois combien de voyage m'a changée. Et combien le travail mené sur moi-même porte peu à peu ses fruits. Chaque jour j'essaye de cultiver la bienveillance, le regard positif sur la vie et sur les gens; j'apprends à prendre avec plus de sérénité ou de distance toutes ces petites choses qui nous irritent tellement d'habitude: un train en retard, un conducteur devant qui n'avance pas, quelqu'un qui aboie sur vous ou sur le train en retard...

Plus facile à dire qu'à faire, surtout certains jours, et il y a des jours où je plonge, où je tremble à l'intérieur, mais c'est comme si j'avais le sentiment que tout ce qui m'a nourrit m'aide à passer ces moments plus facilement.

Certes, je ne sais toujours pas ce que je veux faire du reste de ma vie. Partir? Rester? Et si je pars, je fais quoi, comment je vis? Et si je reste, je continue comme ça?

En attendant que tout ceci décante encore, je prends ce qui est à prendre, je savoure la plénitude que j'arrive désormais à toucher du doigt, elle qui m'était inconnue durant tant d'années. Et rien que cela, c'est merveilleusement bon.


mardi 20 septembre 2016

Reprendre le cours de la vie

Mon passage à New Life, en Thailande, m'a permis de découvrir un peu - oh, juste un peu... - le boudhisme, et il m'a enseigné une chose importante: l'impermanence. Rien ne dure. Les bons moments comme les moins bons ont tous une fin. Au début, je me suis dis "mais c'est triste, ça!" En fait, non. Quand tout va bien c'est sûr, on a envie que cela dure. Mais quand tout va mal, on peut essayer de se rappeler, quand on en a le courage, que ce mauvais moment devrait se terminer un jour.

Ma détresse du mois d'août, ma plongée dans les abysses de la réadaptation à la vie normale, s'évanouissent peu à peu, je reprends le cours du quotidien, j'ai un métier, des amis, un appartement, il y a pire comme sort, et je revis petit à petit. Oh, pas grand chose, mais je retrouve le sourire, les beaux souvenirs de mon périple se remanifestent dans ma mémoire, je retrouve de la force. Du moins en ce moment, hein, puisque comme je l'ai écrit, rien ne dure!

Mais je prends cela avec plaisir, je me donne de petits coups de pied aux fesses. Voyons, au programme: une rencontre le 1er octobre pour raconter mon année - rien ne vaut la "vraie" rencontre, parler c'est quand même plus vivant qu'écrire! - et promis juré, des prises de contact avec des maisons d'éditions pour faire un livre de mon blog (merci à ceux qui m'ont encouragée dans cette voie!) et quelques magazines pour leur proposer un ou deux reportages. De toute façon, je n'ai rien à y perdre, hormis de grandes paires de claques si je ne le fais pas. Dont acte!

Je vous tiendrai au courant, bien sûr!

A la prochaine, donc....

Ah oui, si: le 1er octobre est presque complet, il y aura une deuxième séance, hé hé...

dimanche 28 août 2016

Un an autour du monde : et après ?

Voici trois mois que je suis rentrée de mon tour du monde. Qu’en reste-t-il ? Une certitude d’abord : je ne regrette aucunement ce choix que j’ai fait de partir. Même si une année de voyages, c’est aussi une année avec des hauts et des bas, des galères, c’était aussi l’accomplissement d’un rêve.
Et il vient un moment dans la vie où l’on se dit : tes rêves, tu les vis, malgré ta peur devant l’inconnu que ces rêves représentent, malgré les peurs des autres qu’ils transposent sur toi, malgré tous les obstacles que la vie moderne te met sous les pieds dès que tu commences à travailler concrètement sur ton rêve (les papiers, la banque, l’assurance, le logement, etc, etc). Ces moments où l’on se dit : « peut-être que cela sera difficile, peut-être que cela sera dangereux ; mais demain je peux très bien traverser la route, me faire renverser par une voiture et mourir. Ce jour-là, il sera trop tard pour pleurer sur mon rêve perdu. »

Donc, un petit conseil : si vous avez un rêve, allez-y !!!! Vivez-le ! On n’a qu’une vie (ben oui, on n’est pas des chats…). Peut-être allez-vous vous casser la figure, mais vous pourrez vous dire que vous aurez essayé – la fameuse histoire des remords et des regrets – et de toute façon, dans la majorité des cas vous ne vous casserez pas la figure car vous ferez ce en quoi vous croyez.


Lucie, Marley, Nagib, Susan, et tous les autres…


Deuxième chose que je retiens de cette année, ce sont les rencontres, les gens. Les autres, c’est la plus grande richesse d’un voyage... 
Lucie Durocher au Québec, un cœur gros comme ça et l‘impression, dès la première seconde, d’être avec une copine de toujours ;
Marley et sa Mini Cooper pour cette virée aux chutes du Niagara en papotant et grignotant des pistaches ;
Megan, de Deer Lake Lodge, me racontant sa rencontre avec Jon, « comme une évidence » alors que nous pagayons dans la parc Algonquin ;
Doreen et son fils m’apprenant la réalité de la vie des « Nations premières » - les Indiens d’Amérique – aujourd’hui ;
Riet, l’Américano-hollandaise qui a transformé un quartier pourri de Detroit en havre de paix fermière ;
Becky et ses colocataires de Houston, chez qui j’ai passé une soirée mémorable pour ma première expérience de couchsurfing ;
Francisco, Jovel, Juana, Wilmer, de la finca El Yunque au Nicaragua, qui m’ont considérée comme une des leurs et nos pleurs lorsque nous nous somme quittés ;
Veronica, volontaire de New York à El Yunque, véritable boule d’énergie, et la complicité qui a uni les deux occidentales que nous étions dans ce lieu oublié de tous du Nicaragua ; 
la conversation avec de jeunes travestis à Matagalpa, trainant leur ennui sur un banc car ils n’ont pas le droit d’aller  à une fête organisée par l’église ;
ce couple d’Américains retraités qui m’ont hébergée la nuit suivant mon agression à Granada, qui m’ont offert ce dont j’avais le plus besoin, le réconfort, et m’ont permis d’éviter de passer la nuit dans un hôtel pour backpackers rempli de puces et accueil de geôlier de prison;  
Mathieu, l’infirmier de Tahiti qui a vu mon SOS sur Facebook et m’a permis de passer le reste de mon séjour à Granada dans un hôtel pour backpackers tenu par des Français ;
Helen, Germano-américaine,  et la course menée par nos deux bébés tortues relâchées sur la plage à San Juan del Sur ;
Bob, le vieux marin américain et sa barbe digne d’Hemingway, tombé en amour avec Rio Dulce, ce petit paradis entre eau et jungle au bord de la mer caraïbe au Guatemala ;
le chauffeur de taxi de Managua fan d’un groupe de salsa rock et nous voilà tous les deux à nous dandiner  joyeusement au son de la musique sur nos sièges de voiture ;
Velise et Tauru, Philippe et Moe, Elise, ces Polynésiens croisés en stop et qui m’ont raconté leurs îles, leur vie ;
Nagib et Odile, qui m’ont tellement aidée dans la paperasserie et toutes ces merdouilles à la schtroumpf pour remplacer ordinateur, smartphone et appareil photo envolés sous la menace d’un couteau de Granada ;
Petra la wwoofeuse suisse dans la ferme perlière et sa gentillesse, et dont nos routes se sont recroisées en Inde ;
la douanière d’Auckland en Nouvelle-Zélande, qui m’accueille avec un sourire grand comme ça;
cette habitante d’Auckland sur le quai du RER qui m’adresse son réconfort car nous sommes quelques semaines après les attentats du 13 novembre ;
Dave, le gérant de l’auberge de jeunesse de Waitomo, qui m’emmène en voiture jusqu’au village pour être sûre que je ne raterai pas mon bus ;
le passager d’un autre bus qui me prête sa couverture car je grelotte de froid et me souhaite la bienvenue en Nouvelle-Zélande - cet accueil, cette chaleur c’est mon plus beau souvenir de la Nouvelle-Zélande, avec des épisodes si nombreux que je n’arrive même plus à m’en souvenir - ;
Denise et Nick, Franco-zélandais qui m’accueillent pour Noël et me prêtent leur maison ;
Susan et Geoffrey – ah, Susan et Geoffrey… - et ces quinze jours où le wwoofing est devenu un échange d’amitié avec ce drôle de couple improbable, elle alternative, bio et new age ; lui kiwi de la côte Ouest pur sucre, chasseur, chercheur d’or et pieds bien ancrés dans la terre ;
Mick le vieux sculpteur de jade et son allure à la Grandpa de chez Lucky Luke ;
Claire la Française installée à Greymouth, qui me raconte tout, tout, tout sur l’histoire de la région avec un enthousiasme incroyable, et ce moment d’anthologie quand elle me mime un weka, un oiseau coureur du pays ;
les Japonais si adorables, qui se plient en quatre pour m’aider ou renseigner alors qu’ils ne parlent pas un mot d’anglais ;
les postières de Tokyo qui mettent un point d’honneur à me trouver les timbres les plus variés pour envoyer mon paquet qui se retrouve tapissé de fleurs, monuments et autres  personnages de dessin animé ;
Kei et Kotaro, mes hôtes d’AirBnB à Tokyo, leur bonne humeur contagieuse et les « So, so, so » (oui, oui, oui) que claironne Kei à tout instant ;
Aya, dans la guesthouse de Kyoto, qui partage sa soupe miso du petit déjeuner avec moi ;
cette dame de Nara si heureuse de me faire partager, ainsi qu’à deux Américaines, une fête traditionnelle de la ville tandis que nous trois grelottons stoïquement de froid ;
Louise ma nièce étudiante à Tokyo et qui m’initie aux délices du purikura, ce photomaton très fille, où on se relooke et on danse ;
ce joueur de didjeridoo dans un parc de Tokyo qui m’adresse un sourire d’une incroyable douceur ;
Laure et Tom à Bangkok et qui me communiquent leur passion pour cette ville « où tout peut arriver », une ville totalement amorale, un pays entre douceur, corruption, apparence et consommation ;
ces adorables voisins de table dans les rues qui rient lorsque je m’étrangle avec mon plat super-épicé (cela n’arrivera pas qu’une fois…);
les crises de fou rire en jouant au « chicken game » avec Lorraine et Victor les Français et Georgia la Canadienne à Happy Healing Home  près de Chiang Mai;
la chasse nocturne aux amphibiens dans trois flaques d’eau avec Victor, passionné de ces bestioles ;
tous ceux avec lesquels j’ai partagé les montagnes russes des sentiments durant six semaines à New Life, Moises, adorable Moises, de Suisse et d’Espagne, consolateur et conseilleur, Jorden l’Israelienne et ses cheveux aux couleurs multiples, l’Anglais Narinder, solaire, Michelle l’Ecossaise, réservée et profonde, Samina et ses ateliers qui m’ont tant bouleversée, Jon l’Américain, la bonté et la gaieté, Rachael, qui s’est épanouie au fil des semaines, Valentina, Katia, Gemma, Rob, tant d’autres, tant d’autres dans ce lieu si particulier ;
les sourires et les quelques mots échangés avec des familles indiennes, mes voisins de train quelque part entre le Karnataka et le Kerala qui m’aident à m’y retrouver dans le mystère du monde ferroviaire indien ;
ces augustes messieurs de Pondicherry avec lesquels je partage un banc devant l’océan indien et qui me parlent de comment va le monde ;
Patrick et Brigitte les Lyonnais de Pondicherry qui me font découvrir ce petit bout de France au bout du monde ;
les gens de toutes les nationalités que je rencontre à l’ashram d’Amma, dans le Kerala, qui me font entrevoir la plénitude qu’ils ressentent dans ce lieu baigné de spiritualité, sorte d’agora sacrée, et me donnent tellement envie d’y retourner, un jour j’espère… ;
Thomas, Renzo, cher à mon coeur, et tous ceux croisés à Auroville, cet autre lieu unique, une des rares utopies des années 60 à exister encore, ville où vivent en harmonie des gens du monde entier désireux d’inventer un autre futur…

Vous tous, je ne vous oublierai pas…


Au dodo !

Voici donc pour la nostalgie ! Après, un voyage autour du monde en sac à dos, c’est aussi du concret. Du très rigolo et du un peu moins. A commencer par deux éléments essentiels, la nourriture et le sommeil. 

Côté lit, le pompon était à El Yunque, ce matelas moisi et taché qui m’a failli faire prendre les jambes à mon cou ; j’ai échappé aux puces de Granada mais pas aux poux d’Auroville ; les bancs des gares ferroviaires et routières de Thaïlande sont en revanche très confortables, si l’on excepte le réveil en fanfare le matin au son de l’hymne national, et pour lequel il faut se mettre debout.
Dans les fermes, j’ai aussi bien dormi dans du cosy et mimi – voire carrément ma propre maison - que dans des pièces fourre-tout, et bien sûr les cabanes et huttes en bambou d’Asie, sous  des chaleurs écrasantes.

Jus de palourde, scorpions et vins

Et l’alimentation ? La palme du plus étrange revient…. Au Québec ! Il faut avoir goûté au moins une fois dans sa vie à la bière Clamato – bière, jus de légumes et jus de palourdes – mais une seule fois suffit… En revanche, j’ai adoré la poutine (frites, sauce brune et fromage qui fait skouik skouik) et le « touski » (tout c’qui reste) de Lucie. Chez Megan et Jon à Deer Lake Lodge, ainsi que chez Brittney et Kieran à Detroit, j’ai eu de merveilleuses expériences gastronomiques avec des légumes de saison, découvert le granola fait maison, les chips et pizzas de kale, un chou qui fait fureur en Amérique du nord, le nouvel aliment santé – beauté – bien-être, etc.

A Debajehmujig, j’ai pu goûter au plat préféré des Ojibways, la corn soup, la soupe de maïs ; cuit avec des haricots rouges et des pieds de cochon, ça tient au corps ; pour l’aspect gustatif, je reste assez dubitative… Au Nicaragua, on mange quoi ? Du gallo pinto ! matin, midi et soir. Gallo pinto, c’est-à-dire riz et haricots rouges, agrémentés de tortillas et/ou de bananes plantains cuites à l’eau. A midi et le soir, je veux bien, mais le matin, j’avoue que c’était au-dessus de mes forces. Je me rabattais sur du pain et fromage bizarroide avec du café froid (la flemme d’allumer un feu).

En Polynésie française, le poisson cru au lait de coco est un bonheur, à déguster partout ;   j’ai gouté au taro – la malanga du Nicaragua – une racine dont on fait une pâte ; et dans tous ces lieux chauds de tropiques, Amérique centrale, Polynésie française, Asie du sud-est, Inde, j’ai fait des folies des jus de fruits frais directement mixés devant vous : mangue, papaye, orange, coco, et surtout pastèque, un pur délice…

En Nouvelle-Zélande, pays du mouton, j’ai mangé du mouton une fois en un mois et demi … Forcément, on l’exporte. Mais je me suis régalée de houmous à la tomate, à la carotte ou à d’autres légumes, et j’ai souvenirs émus des bouteilles de merlot, shiraz, chardonnay ou sauvignon blanc que je tirai du coffre de la voiture (vive les bouchons que se vissent et se dévissent !) et dont je dégustais un verre le soir devant des paysages fabuleux.

Au Japon, j’ai adoré les soupes aux multiples saveurs, légères mais nourrissantes et si appréciables dans le froid de l’hiver ; j’ai goûté aux petits-déjeuners japonais, avec soupe miso, riz vinaigré ; les repas végétariens dans le monastère du Mont Koyasan ont été un délice aussi bien visuel que gustatif, chaque aliment, même le plus simple, étant arrangé avec une délicatesse raffinée…

En Thaïlande, les rues sont une explosion d’odeurs et de saveurs au point qu’on ne sait plus où donner de la tête. Comme tout touriste qui se respecte, j’ai bien sûr goûté au scorpion et aux insectes grillés – pas mauvais du tout, et même savoureux pour les vers à soie – mais les repas les plus incroyables ont été à Happy Healing Home chez Pinaan Jim, non seulement car c’était un délice de chaque jour grâce aux épices et herbes fraichement cueillies – ail, citronnelle et coriandre, un mélange divin – mais aussi parce que le cérémonial qui entourait ceux-ci leur conférait une dimension spirituelle intense. Quant à mes six semaines à New Life, elles ont été la preuve que le végétarien peut être goûteux ; et mine de rien, mon estomac s’est éduqué : depuis, quand j’ai faim de consistant, ce n’est pas de viande, trop grasse et riche, que j’ai envie, mais de légumineuses.

Et, avouons-le, après les délices culinaires du Japon et de la Thaïlande, la cuisine indienne, ben, bof… Végétarienne, peut-être, mais souvent grasse et pas vraiment raffinée…

Le tour du monde en 365 jours…

Voilà pour mon tour du monde culinaire  personnel. Que dire encore ? Un an de voyage en solitaire, ce sont aussi des moments difficiles, et je ne parle pas uniquement de mes malheurs en Amérique centrale… Je sais maintenant que l’erreur principale que j’ai faite est d’avoir voulu faire le tour du monde en un an. Un an pour un tour du monde, c’est trop peu. Cela dit, je n’avais pas le choix, puisque je devais reprendre le travail après mon congé sabbatique. Mais l’expérience me permet dire : si on choisit un an, mieux vaut aller dans deux continents uniquement, afin de prendre le temps de les connaître ; si on choisit le tour du monde, il faut se donner deux ans.

Et le rêve du « tour du monde » était là, d’où mon choix. Mais j’ai trop souvent eu ce sentiment que « je passais à côté » de choses car je devais continuer ma route… J’ai appris la leçon pour la prochaine fois !

Je suis aussi passée par cette phase que les voyageurs au long cours connaissent, la lassitude. Ce moment où on n’a plus envie de découvrir un lieu ou ses habitants, où on en a marre des galères du routard, où on a simplement envie de ne rien faire. Pour moi, elle est arrivée au bout de neuf mois, en Thaïlande. Dans ces moments-là, oui, il faut s’arrêter quelque part, souffler, laisser passer la phase. New Life tombait à point nommé pour moi… Et après on repart ! En Inde, j’ai retrouvé ainsi le goût du voyage et des rencontres.

A l’instant même où j’écris tout cela, je vois et je vis que, même si j’ai connu des moments difficiles durant cette année, le plus dur ce n’est pourtant pas pendant, mais avant et après.  Avant car on a cette trouille de partir dans l’inconnu, les doutes sur son choix, et après… Mon dieu, après, que c’est dur… Impression d’être prise au piège de la vie quotidienne, du retour à la normale, de ne plus savoir où j’en suis, boule au ventre chaque jour en allant travailler… Sentiment de ne plus trouver ma place… Envie de repartir, mais ne plus croire en soi pour en avoir la force… Ce n’est peut-être qu’une étape à franchir, mais dieu qu’elle est dure…

Alors, vous tous qui avez eu le courage de lire tout cela jusqu’au bout, je fais appel à vous. Vos manifestations d’amitié, un café à prendre ensemble, des retrouvailles, des gens qu’on aime, cela fait tellement de bien… J’ai besoin de votre soutien et de votre bienveillance pour retrouver cette énergie qui m’avait conduite sur les routes du monde, et pour réfléchir à ce que je veux faire du reste de ma vie…

MERCI A TOUS




lundi 15 août 2016

Adieu ou au revoir?

Eh bien voilà, le tour du monde en wwoofing s'est terminé, il y a maintenant plus de deux mois.
Prise par le quotidien du retour au travail, je réalise que je n'ai jamais évoqué mes derniers moments. Des moments pourtant très forts, en Inde, entre ashram d'Amma et Auroville.

Amma, "la mère qui embrasse", figure spirituelle de l'Inde, une des rares femmes gourous. Née au Kerala, elle parcourt le monde depuis 30 ans pour prêcher l'amour en prenant les gens dans ses bras. Elle le fait lors de "darshans", où, durant des heures, elle écoute et embrasse les gens. On estime qu'elle a ainsi embrassé plus de 30 millions de personnes.

Lors de mon séjour - hélas trop court, une seule nuit - à Amritapuri, l'ashram qu'elle a créé sur son lieu de naissance, je ne l'ai pas vue, mais la vision de cette immense communauté, bourdonnante comme une ruche dédiée à la spiritualité m'a fortement marquée. Un immense temple devant lequel se mêlent résidents vêtus de blanc et visiteurs pour quelques heures ou quelques mois, toutes les langues du monde qui se parlent...

J'ai le souvenir de la jeune femme nous faisant visiter les lieux, une Française fine et gracieuse, planante - j'avoue avoir hésité entre illuminée et fumeuse de moquette - mais aussi de gens me parlant du sentiment de ressourcement, de sérénité, d'ouverture du coeur qu'ils ont lorsqu'ils viennent dans ce lieu.  Ceux qui ont vécu le fait d'être embrassés par Amma évoquent "le plus fort sentiment d'amour qui leur ait jamais été donné".
Méditation au bord de l'océan. Une sérénité que j'aimerais tant retrouver...


Alors oui, on trouvera des critiques, des doutes sur Amma, on peut penser à des dérives sectaires, mais tout ce que je dont je peux témoigner, moi, c'est le sentiment d'appartenance très fort que j'ai ressenti là-bas, la sensation très étrange d'être dans un lieu où la spiritualité imprègne chaque moment.

Vous direz, ce n'est pas en un jour et une nuit qu'on peut découvrir la face cachée des choses... Mais comme je l'ai déjà indiqué, je n'ai pas fait durant mon tour du monde un travail de journaliste, j'ai simplement raconté ce que j'ai vécu.

Utopie en voie de disparition ou virage vers un nouvel avenir?


Auroville a été également un moment fort, d'une autre façon. Fondée en 1968 à coté de Pondicherry, par "La Mère", une Française qui était la compagne spirituelle du gourou Sri Aurbindo et autant vénérée que lui par les Indiens, Auroville a pour but d'être "le lieu d'une vie communautaire universelle, où hommes et femmes apprendraient à vivre en paix, dans une parfaite harmonie, au-delà de toute croyance, opinion politique et nationalité".

Un lieu vraiment étrange, où l'on hésite en permanence entre espoir et scepticisme cartésien. Car ce qui devait être une ville de 40 000 personnes en abrite quelque 2500; on se retrouve ainsi face à une mairie, des centres culturels et autres pavillons internationaux années 70 noyés dans la végétation au bout de chemins de terre, on a l'impression d'un lieu qui tombe en ruines, et en même temps on voit des fermes biologiques, de l'artisanat de qualité, un lieu qui produit et vend dans le monde, un lieu tout à fait intégré dans la vie pondichérienne et où les stagiaires viennent du monde entier.

En fait, j'ai eu le sentiment que l'utopie soixante-huitarde dans tout ce qu'elle avait d'utopique justement et de "peace and love" qui fait sourire aujourd'hui, y meurt doucement, mais qu'elle est en train d'être remplacée par ce mouvement mondial alternatif vers une autre société, plus réaliste celui-ci, et donc plus réalisable.


Comment régler les problèmes de sécurité routière avec humour...


Joy guesthouse, où j'ai logé.


Toujours est-il que le lieu m'a testée, si l'on peut dire, pour des raisons bassement concrètes: quatre jours là-bas, quatre jours de pluie transformant les chemins de terre en chemins de boue et faisant planter une douce odeur de moisi sur mon matelas, des activités au ralenti car on était en vacances scolaires - mais bon, quand on voyage sur un an, on ne peut planifier toutes ses étapes selon la meilleure période, hein? - et, ô rage, ma présence ici pile la semaine annuelle de fermeture du Matrimandir, "le" lieu d'Auroville, immense coupole où l'on vient méditer dans un puits de lumière.

Bref, Auroville a été un excellent lieu pour tester ma capacité - ou pas - à vivre la frustration... Heureusement, j'y ai vécu là aussi de belles rencontres, du ressourcement énergétique, avec Thomas le Français, Renzo l'Italo-néo-zélandais... Quel que soit le moment ou le lieu, on peut toujours trouver du bon quelque part... 

vendredi 3 juin 2016

Des joies du voyage en Inde

Ah, les moyens de transport en Inde, toute une histoire... Bus, train, ferry, pirogue, juste un petit aperçu en photos, pour le plaisir...

Bus de nuit de Pondicherry à Bangalore: de vraies couchettes, comme dans un train. C'est la première fois de ma vie, un vrai luxe, pour quelque chose comme 1000 roupies, soit 13 €...



De Bangalore à la ferme d'Annadana dans les Western Ghats (une chaîne de moyennes montagnes longeant l'Ouest de l'Inde) du Karnataka: huit heures de train de nuit en couchettes seconde classe climatisées pour Sangita et moi, sur les banquettes non climatisées pour l'équipe d'Annadana; plus quelques heures de bus brinquebalant et de ferry.











De Kundapuram dans les Western Ghats à Cochin dans le Kerala, douze heures de train:






D'Allepey (Allappuzha) dans le Kerala à Kulam, cinq heures de ferry.




Pause repas en milieu de parcours.

Une barque pour traverser ensuite la rivière plutôt que de prendre le pont à pied avec le sac à dos.

En Inde, le casque sur les deux-roues est obligatoire, mais uniquement pour le chauffeur...



mercredi 1 juin 2016

Kerala (2): douceur de vivre à Cochin

Si le Kerala est célèbre pour ses backwaters, il abrite également Cochin (Kuchin), au bord de la mer d'Arabie, belle ville ancienne, où la présence hollandaise et portugaise apparaît encore à travers les augustes bâtiments parfois en ruines, parfois restaurés avec goût, le vieux cimetière hollandais (hélas fermé, je n'ai pu en apercevoir les tombes qu'en les zyeutant à travers  la grille, frustration...), les petites ruelles calmes où l’on se perd, les églises baroques, le vieux quartier juif tout de bric et de broc…



Rues calmes dans le vieux Cochin.



La cathédrale.

Les augustes bâtiments en ruine sont légion.


Le vieux quartier juif.




Patio dans l'élégant Old Harbour hotel.


J'ai aimer flâner dans cette ville empreinte d'une certaine douceur de vivre. En ces temps de grandes vacances en Inde, les vacanciers se pressent au bord de l’océan, les femmes en sari ou en salwar kameez - la tunique portée sur un pantalon, l'écharpe assortie drapée sur les épaules, tenue venue de l'Inde du Nord - et les enfants jouent avec les premières vagues. Pas question en effet pour une femme de montrer ses épaules ou ses jambes, tandis que le ventre et le dos peuvent se montrer, comme c’est le cas pour les saris - durant mon séjour en Inde j'ai adopté régulièrement le salwar kameez.








Comme dans toute ville d'Asie, les petits vendeurs sont bien sûr partout, on peut acheter son poisson frais pêché avec les carrelets chinois (d’immenses filets sur des perches) et le faire cuisiner dans les petites gargottes sur la place tenues par des jeunes tous fiers de vous sortir deux mots de français - "sipartimonkiki" entonné joyeusement par le serveur, cela vaut le détour - , on déguste un jus de concombre et menthe frais pressé au délicieusement élégant et suranné Old Harbour Hotel, on loge à la guesthouse Greenwood Bethlehem, tenue par un adorable couple qui affiche tous les saints de la chrétienté sur les murs et les meubles, on va voir un spectacle de kathakali, la danse traditionnelle du Kerala et on se retrouve embauchée pour monter sur scène, on a la très mauvaise idée de vouloir circuler à vélo dans une des rues les plus commerçantes de la ville où l'on se prend des frayeurs et des sueurs froides de se faire écrabouiller à chaque mètre par les cyclos et rickshaws qui vous frôlent sans sourciller, on se fait saucer par une pluie de mousson alors que la mousson n'est que dans un mois, suscitant les rires des passants abrités sous leur parapluie… Bref, j'ai aimé Cochin.



Mes jeunes cuisiniers: "Sipartimonkiki!"

Avoir envie, pour une fois, de s'habiller en robe légère, ou l'art de se faire saucer par une pluie de mousson précoce.








Front de mer avec les carrelets chinois, filets de pêche géants.


Le Kathakali, spectacle traditionnel du Kerala; la séance de maquillage, qui dure plus d'une heure, est déjà un spectacle en soi. Les acteurs - danseurs sont exclusivement masculins.



Les femmes du Kerala dansent le mohini attam.



Le kathakali conte des scènes du Mahabharata; le jeu des expressions (navarasam) y est très important, celles-ci représentant l'amour, la colère, la crainte, le ridicule, le dégoût, la tranquillité, etc.









Krishna.